LE MARTROY

"Un grand propriétaire de Fontenay, celui que les habitants de cette commune vénèrent sous le nom de Victurien, a été à la fois le laïc martyrisé conjointement avec Savinien, Potentien et leurs compagnons, clercs vers 270, mais aussi le donateur à l'église de ses biens, expliquant la fixation des chrétiens et notamment d'ermites à l'entour du futur site de Ferrières (1).

La plaine du Martroy paraît avoir été le théâtre de luttes sanglantes; on y a trouvé de nombreux débris d'armes (2). Cette plaine est située entre la Croix Quantine et la voie romaine de Sens à Orléans, voie appelée "chemin de César".

Le Martroy, tantôt nommé Martroy-Colombier, parfois le Martroy-lès-Hasliers, voire même Lallier, semble avoir été très tôt indépendant de l'abbaye de Ferrières.
Nous avons vu que l'abbé de Ferrières, le cardinal de Tournon, le 8 mai 1537, oblige Marie de Chaillou, dame du Colombier, à lui rendre foi et hommage, non pas pour ce fief, mais pour ceux de Puis-Guignard et Bas-Toury(3). En 1545, lors de la convocation du ban et de l'arrière-ban au bailliage de Sens, le seigneur du fief du Colombier-Martroy est Claude Breschard qui le détient de Marie de Chaillou veuve de Pierre Bouchet. Le fief de Lallier est à cette époque la propriété de Jehan du Bois, escuyer des Bordes, de Thurelles en la paroisse de Dordives. Ce petit domaine "vault de revenu 12 livres 10 sols". Il est taxé à 30 sols.
Ces fiefs sont moins importants que ceux de Cornou et Toury. En 1570, Cornou vaut 300 livres de revenus annuels, Toury 150. Le fief du Colombier-Martroy dit Lallier ne vaut que 60 livres de revenus.

En 1575, ils sont deux à posséder Le Martroy-Colombier, chacun pour moitié: Jehanne du Bouchet, veuve de feu Claude de Villac ( ou de Billard) seigneur de Pithurin et Claude Breschard.

Vers 1630, le propriétaire du Colombier est Henry Mouche, fils de feu François, procureur en la Cour du Parlement à Paris. Il est aussi propriétaire des fiefs de la Malladrerie et la Croix Cantine. Le fief de Lallier est la propriété des héritiers de Maître Pierre Petit, également procureur en la Cour du Parlement à Paris.
Le sieur Mouche, bourgeois de Paris, seigneur du Colombier, este en justice afin d'obtenir sa radiation sur le rôle des tailles des années 1635 et 1636. Un arrêt de la Cour des Aydes est alors signifié aux habitants de Nargy (4). C'est encore Etienne Bouchet, notaire de Nargy, qui retrace l'affaire.

Le 22 mai 1636, à l'issue des vêpres, devant la grande et principale porte de l'église, le peuple s'est réuni. On y aperçoit, Daniel Guarnier, Estienne Begnet, Louis Prochasson, André Poing, Claude Borget, Philippe Rodde le jeune, Jacques Albot, Pierre Leroy, Cezar Demars, Anthoine Clément le Jeune, Estienne Tartinville, Denis Gordet, Daniel Amaury, Laurent Simon, Mathieu Baulier, Martin Larcheron, Jehan Demars, Pierre Clément, Edme Bretin, Eutrope Jomat, Jehan Clément, Jehan Pollier, Jehan Larcheron, Jehan François, Edme Foudreau, Guillaume Le Filoux, Golbert Bouquinville.

A ce groupe, "faisant la plus saine et principale partie des habitans de la dite paroisse" s'est joint, "Henry Mouche, sieur du Coulombier, secrétaire de la Maison de Monseigneur le Prince de Condé (5), bourgeois de Paris y demeurant, rue Saint-Jehan de Beauvais".

"Lesquelles parties, savoir le dit sieur du Coulombier, disons avoir obtenu Arrêt de la Cour des Aydes contre les dits habitants, en date du quatorzième jour de mars dernier, à eux signifié, par lequel il aurait été maintenu en sa qualité de bourgeois de Paris, et ordonné qu'il soit rayé et biffé des rôles de taille de la dite paroisse de Nargy, et que les deniers à quoy il a été taxé et contraint de payer par les habitants, assesseurs et collecteurs des dites tailles lui seront rendus et restitués par les mêmes voies qu'il y a été contraint
et défense aussi, aux dits habitants de la paroisse du dit Nargy de le comprendre à l'avenir dans leurs rôles.
Pour l'exécution duquel Arrêt, il était en voie de les poursuivre à lui rendre ce qu'il a été contraint de payer tant en l'année passée, qu'un quartier de la présente année, montant le tout à la somme de cent douze livres trente sols, et en outre lui rendre les frais qui ont été faits en exécution jusqu'à ce jour, ce qui eût pu causer beaucoup de peine et dépenses à la dite paroisse pour auxquels, a bien nourri paix et amitié,
Sur ce, voyant accordé en la forme et manière qui ensuite c'est à savoir que, le dit sieur Mouche s'est restreint pour faire plaisir aux habitants de la dite paroisse, à la somme de six?vingt livres tant pour les deniers ainsi par lui avancés que pour tous les frais généralement quelconque.
Et en renseignement de quoi, les dits habitants obtempérant au dit Arrêt au moyen unanimement et d'un commun accord avoir consenti que le dit sieur Mouche soit rayé et biffé des rôles de taille, ce qu'ils promettent exécuter et le faire rayer d'iceux rôles pour l'année passée et de la présente dans la huitaine,
Et promis de payer la dite somme de six-vingt livres solidairement dans le jour et fête de Saint-Martin prochain venant".

 


(1) Notes d'histoire locale par Monsieur Paul Gache - Extrait de l'Eclaireur du Gâtinais - octobre 1972.
(2) Annales du Gâtinais nE1 année 1883 page 47.
(3) La veuve Jeanne du Chaillou fait aveu le 8 octobre 1540 du fief du Chesnoy (paroisse de Treilles). Le bailli de Nemours pour procéder, le 24 janvier 1543, à la requête du procureur du Roi au dit bailliage, à la saisie féodale du fief du Chesnoy, fait saisie entre les mains des fermiers et débiteurs du seigneur Jean de Chaillou, écuyer, l'un des descendants de Louis de Chaillou, seigneur de Treilles en 1440. (Annales du Gâtinais n° 24-année 1906- Archives du Loiret - Référence A 1415).
(4) Archives départementales du Loiret. Référence 3 E 15827.
(5) Branche collatérale de la Maison de Bourbon.