Charrau se met à son tour à poursuivre les Monnay jusqu'à la porte de garde où, en présence du voisin du contrôleur du canal, le sieur Jean Malval, il récidive dans sa précédente version, tout en vociférant quelques insultes:

" L'herbe a été coupée dans un de mes prés! Tant que je me trouverois avoir besoin d'herbe, j'irois à toute heure de nuit, dans mes prés, que la loi me permettroit. Je me fous de ce que l'on dit sur moi et des poursuites que l'on pourroit intenter contre moi !"

Sur ce, en maugréant, il se retire.

Le lendemain, le maire Miguet se rend avec les Monnay, sur les îles louées à ce dernier par Monseigneur d'Orléans. A leur étonnement, ils constatent qu'une grande partie de l'herbe a été coupée. La confrontation entre la pièce à conviction et l'herbe restée sur place n'autorise pas la moindre équivoque. Elles sont semblables.

Ils se rendent alors chez Charrau. Miguet lui demande si vers les "onze heures du soir ou environ, il n'étoit pas allé couper un paquet d'herbe ".

La réponse est affirmative, mais il maintient ses dires de la veille. Le ton monte. Il dit au maire qu'il "n'avoit pas de compte à lui rendre, que ce n'étoit pas à luy de dicter les loix, et qu'il les prioit fortement de se retirer ".

Alors qu'ils s'exécutent, en passant devant la grange ouverte, le rusé maire y entre, découvrant " une cache avec très grande cantité d'herbe tant verte que fanée, mêlée avec du foin et absolument semblable à l'herbe de l'île".

Ils se transportent alors avec Charrau, là où il prétend avoir coupé l'herbe. Hélas la confrontation laisse paraître des herbes dissemblables. Charrau qui avait été pris la main dans le sac, était confondu par le rusé maire.

Ce genre de manoeuvre risquant de compromettre l'intérêt des habitants, un procès verbal de sa conduite est dressé. L'affaire s'arrête là pour Nargis, mais compte tenu des mentalités de l'époque, il est à peu près quasi-certain que l'affaire a été portée devant le tribunal du District.