Les enfants récupérés rejoignent l'église et la cérémonie se déroule tout à fait normalement, y compris la confirmation puisque l'évêque est là.


Déjeuner un peu tardif dans ma grande salle à manger de l'hôpital, mais tout le monde dévore les poulets étiques que mon pauvre "Toubib Seghir" a eu tant de mal à trouver. Tout le monde les trouve délicieux, quoiqu'un peu fermes, un peu cuits, mais l'appétit des convives s'en accommode fort bien.


A seize heures trente tout est consommé et Monseigneur Mercier rejoint l'aérodrome et nous quitte pour je ne sais quelle destination, le R.P. Armel toujours aux commandes de son Norecrin.

 

El Goléa: CapitainE Mouret, le Père Luçon et Si Beftouh

 

Un jour, notre "Toubib Seghir" nous a quitté : les besoins du service ! Mais nous n'avons jamais perdu le contact. Il était rentré en métropole et poursuivait ses études à Paris, dans le but de devenir anesthésiste-réanimateur. Il y a fort bien réussi puisque intégré dans une équipe de chirurgie osseuse, une des plus renommées de la capitale.


Enfin, nous nous sommes revus, quelques années plus tard et nous avons évoqué cette période de notre vie au Sahara et je lui ai posé la question :
"Maintenant, vous voici dans le milieu chirurgical que vous avez choisi : anesthésiste-réanimateur en titre ! Avez-vous parfois pensé à ce que nous avons fait ensemble, avec les moyens réduits dont nous disposions ? Auriez-vous encore le courage d'opérer dans ces conditions-là ?


"Sachant ce que je sais à présent, m'a-t-il répondu, j'aurais une peur affreuse s'il me fallait travailler ainsi. Nous n'avons jamais eu de gros pépin, mais je sais maintenant qu'ils existent et je crois que j'hésiterais à encourir les risques".


Je sais qu'il n'en pensait pas un mot et qu'en cas de nécessité il n'hésiterait pas plus qu'autrefois, avec plus de circonspection peut-être, avec ses connaissances nouvelles, mais avec la même foi dans son métier et le même amour de son prochain.
 

Réunion officielle à Colomb- Béchar. 

Médecin Commandant Rejenet, Capitaine Delacommune

 

Nous nous sommes souvent revus, téléphoné, écrit après mon propre retour à la vie civile. Mais quoi que j'aie pu faire ou dire, je suis resté pour lui "Mon commandant", puisque j'avais été promu entre-temps, juste avant son départ d'Adrar. Cette appellation comportait à la fois une grande part d'amitié, de retenue et j'ose à peine me l'avouer, une part d'admiration et de respect après notre "communion" en médecine dans des conditions parfois très dures, mais combien enrichissantes.