PREMIER VOTE

 

Ce vendredi 19 février 1790, -décret de l'Assemblée Nationale oblige-, les habitants de Nargis se réunissent pour élire leur Maire. " Condition sine qua non " pour être électeur, il faut être du sexe masculin et être citoyen actif. Est considéré comme citoyen actif celui qui paie au moins trois livres de contributions par an.

Sur cent trente hommes recensés, 84 seulement votent, représentant à peu près, les 60% de la moyenne nationale. Pour être élu, il faut payer en contributions au moins la valeur de 10 journées de travail évaluées à 20 sols chacune.
L'élection qui s'effectue à l'église, consacre Claude Pierre Oudin.

Il refuse, " attendu qu'il étoit peu fortuné, et même Serviteur à gage de son Altesse Sérénissime Monseigneur le Duc d'Orléans, et que si, Messieurs les Officiers des Canaux le requéroient pour ouvrage de son état, qu'il seroit obligé d'obéir à leur commandement faute de révoquation ".

L'assemblée convenant de la véracité de l'exposé du sieur Oudin, insiste. L'élu " acquiesse à la déssision de la dite commune et accepte provisoirement et sous la réserve de son emploi, la place de maire ".

Sont élus, dans l'ordre des voix, cinq officiers municipaux: Joseph Bourget, Jacques Garnier, François Oudin, Antelme Miguet et Pierre Lequatre.

Le samedi 20 février, on procède à l'élection du procureur chargé de défendre les intérêts et de poursuivre les affaires de la communauté. C'est Denis Prochasson, marchand charron.

On élit également douze notables qui forment le conseil général de la commune. Ces premiers conseillers élus sont Pierre Cossat, Louis Tartinville, Etienne Lemaire, Clément Marain, Jean Picard l'aîné, Toussaint Houy ( ancien syndic), Julien Hervi, François Chaumeron, Maturin Crépain, Marain Delaporte, Nicolas Chariot et Jacques Deroin.

Le lendemain, dimanche 21 février, à l'issue de la messe paroissiale, l'assemblée est convoquée au son de la cloche, de la manière accoutumée, par son Maire, afin de se prononcer sur le rattachement de Nargis au département du Loiret.

" Cet arrangement est d'autant plus préjudiciable a la paroisse et a ses abitans qu'ils sont a vingt lieues d'Orléans, trois lieues de Montargis, et qu'il ne peuvent se rendre à ferrière qui nest qua une lieue ou a courtenay qui en est à six que par des chemins de traverses fort dificiles à tenir et souvent impraquicables particulièrement pandant les ivers et lors des crûes deau, Nargis étans séparé de ferrieres par le canal et rivière du Loing et par deux prairies qui sont très fréquemment couverte d'eau que la rivière du Loing en cette partie n'est pas guéable et qu'il n'est pas possible de la traverser qu'a pied ou avec une bête de somme et non en voiture, en passant sur un pont établi vis a vis fontenay dont les sintres sont rompus et qui menassent d'une ruine prochaine ses fondations étant en partie minée et emportée (1).

Qu'il serait au contraire très avantajeux pour la ditte paroisse de Nargis au lieu d'être du département d'Orléans, fut de celuy de Melun, du district de Nemours et du canton de Chateaulandon par ce qu'il ne sont qua douze lieues
de Melun, quatre de Nemours, et une de Chateaulandon quil ont tous beaux chemins et grandes routtes de leurs paroisse auxdittes villes et en outre la facilité de trouver à différants jours de la semaine des voitures publiques par eaux et par terre pour sy rendre, avantage qu'ils n'ont point pour aller à Orléans ".


Ils insistent sur le fait que les hameaux de Toury, Nancé, la Ferrandière, le Martroy, Piturin et les Paysants se trouvent à un quart de lieue de Chateau-Landon, où les habitants viennent acheter et vendre leurs comestibles et s'approvisionner. Ils demandent leur rattachement au département de Melun, et prient les " Seigneurs de l'Assemblée Nationale " de prendre en considération leurs raisons et motifs. On connaît la suite....La raison ne l'emporta point. Pourtant le cheminement du maire était très logique.
 


(1) En 1848, le Maire de Nargis, François Paysan, adresse au sous-commissaire du Gouvernement "un rapport sur un évènement qui aurait pu avoir des suites les plus fâcheuses et qui eut lieu le lundi 24 avril, lors des élections de Ferrières ". Le journal " Le Loing " dans son édition du 6 mai 1848, retrace les faits." Une voiture, dans laquelle se trouvaient huit personnes allant porter leur vote au canton, fut forcée de traverser la chaussée de Fontenay à Nargis, inondée par la crue du Loing à une hauteur de plus de soixante centimètres. Bientôt la voiture déviant de sa route verse dans un fossé, et tout disparaît! ... C'en était fait des huit électeurs, sans le courage du curé Maugiton qui, le premier est venu à leur secours. Plusieurs citoyens ne tardèrent pas à l'imiter; et hommes, voiture et cheval furent retirés sains et saufs ".