Cet héritage de plus de cinq mille livres venait s’ajouter à celui que Marie-Françoise de Couagne avait reçu de son père, et elle pouvait dans son contrat de mariage déclarer qu’elle apportait pas moins de 7.950 livres. D’autres héritages viendront par la suite s’ajouter à ces sommes. En 1757, Marie-Françoise de Couagne apprenait qu’elle recevait un cinquième d’un montant de dix mille livres, provenant de la succession de Louise de Sainte-Marthe, d’abord épouse de Louis de Gannes de Falaise et, lors de son décès survenu vers 1752, épouse du sieur Alexis Nougues domicilié à l’île de la Grenade. Enfin, sa sœur, Louise de Couagne, lui accorda la rente d’une somme de deux mille livres, à la suite de diverses transactions.

Georges de Gannes

Tableau appartenant au Dr Rollet (Charles Moreau)



A l’époque de son mariage, Marie-Françoise de Couagne demeurait chez sa grand-mère maternelle, Marguerite Le Neuf de la Vallière, laquelle était domiciliée rue Saint-Joseph, et qui vint elle aussi demeurer à Trois-Rivières, où elle mourut le 25 avril 1760.

Il va sans dire que la future Madame de Gannes évoluait dans la meilleure société montréalaise. D’ailleurs tous les Couagne en étaient, et ils étaient nombreux. Une demoiselle de Couagne eut même l’honneur d’un commérage de Madame Bégon, qui écrivait le 27 décembre 1748 : « J’ai une nouvelle à te dire : c’est que Martel et sa femme apprennent à danser, dans l’espérance qu’ils ont d’être des bals que Monsieur Bigot doit donner ici. Ce n’est pas tout. Landriève apprend aussi et pour s’accoutumer aux grandes façons, il donne un bal aujourd’hui. Les priés sont : Mesdames Vassan, Martel, Mademoiselle de Gannes et Mademoiselle de Couagne, cette grosse tête Couagnette et ses deux sœurs mariées... »

Nous ne croyons pas, dit Raymond Douville dans son livret sur la Maison de Gannes, qu’il s’agit ici de Marie-Françoise de Couagne. Madame Bégon vise plutôt semble-t-il, Charlotte de Couagne qui devait mourir à vingt-cinq ans, deux ans plus tard, et que Madame Bégon mentionne comme « la petite de Couagne maîtresse de Landrièvre ».

Le contrat de mariage de Georges de Gannes avec Marie-Françoise de Couagne réunit quelques-unes des personnalités les plus en vue de Montréal, tant dans les milieux de l’administration que dans le monde du commerce :

« Etaient présents, pour le futur époux, Haut et Puissant Seigneur Monseigneur le Marquis de la Jonquière, Commandeur de l’Ordre Royal et Militaire de Saint Louis, chef d’escadre des armées navales, gouverneur et lieutenant général pour le Roy en toute la Nouvelle France terres et pays de la Louisiane ; Charles Lemoyne, Baron de Longueuil, Chevalier de l’Ordre Royal et Militaire de Saint Louis, gouverneur de cette ville (1) et gouvernement ; Gaspard Adhémar, écuyer, sieur de Lantagnac, chevalier dudit Ordre Militaire de Saint Louis, lieutenant de Roy en cette ville et gouvernement ; Messire Jacques Joseph Guiton Monrepos, conseiller du Roy, lieutenant général de cette dite juridiction, François de Gannes son frère (2), chevalier, lieutenant d’infanterie.


« Et de la part de ladite damoiselle future épouse et de ladite dame son ayeule : de dame Marguerite de Couagne, épouse de Claude Drouet écuyer, sieur de Saigneville, enseigne d’infanterie ; damoiselle Marie-Anne de Couagne, épouse du sieur Jean Lechelle, négociant en cette ville ; damoiselle Louise de Couagne ses sœurs ; sieurs Alexis Lemoine Monière et René de Couagne négociant en cette ville, ses oncles ; dame Thérèze de Couagne veuve de feu sieur François Poulin de Francheville ; dame Marie-Anne Huber, épouse de Louis de Chap chevalier de la Corne capitaine d’infanterie, chevalier dudit Ordre Militaire de Saint Louis, ses tantes ; René Gaultier écuyer sieur de Varenne et dame Jeanne Le Moine de Sainte Hélène son épouse ; Dame Charlotte Gautier de Varenne épouse du sieur François Marie Soumande Delorme, négociant en cette ville ; dame Marie-Josèphe Guillemin épouse de sieur Pierre Legardeur écuyer sieur de Saint-Pierre, capitaine d’infanterie ; dame Jeanne de Bercy, épouse de François de Vasson écuyer capitaine d’infanterie, sieur Claude Benoist chirurgien et damoiselle Thérèse Baby son épouse, et sieur Louis Claude Dusablé Dandonau cadet des troupes de cette garnison ».
 


(1) Montréal.
(2) C’est par distraction sans doute que le notaire Danré de Blanzy a inscrit le nom de François au lieu de Jean-Baptiste. Car il s’agit bien ici de l’unique frère de Georges de Gannes.