En ce mois de juillet 1944, l'avancée alliée
progresse. Depuis le 6 juin c'est enfin la période de l'espoir tant
attendu. Les époux Verdier donnent l'impression de savourer les moments de
détente apportés par les vacances scolaires. Depuis le mercredi 12
juillet, Jeannette a libéré les 41 des 57 élèves qui fréquentaient encore
la classe unique de cours préparatoire et de cours élémentaire en ce mois
estival. Dans l'autre école, Maurice laisse ses élèves de cours moyen et
de fin d'études aux joies des vacances à la campagne qui s'annonce
prochainement libérée. Mais leurs maîtres d'école n'en demeurent pas moins
actifs dans la clandestinité.
Liliane Rolfe ( alias "Claudie" ou "Nadine") exerçait les
fonctions de radio avec l'agent de liaison "Marchand". Après avoir
émis du garage Lejeune à Saint-Hilaire-Saint-Mesmin, Georges Wilkinson,
officier de l'armée britannique, par prudence lui donna l'ordre de quitter
la région et l'envoya à Egry continuer son service.
Depuis quelques jours le couple Verdier l'hébergeait, d'où elle émettait
avec Londres. Claudie Rolfe fut arrêtée à Nargis chez Madame Verdier
(1). Le 30 juillet 1944 au matin, les
Allemands se présentèrent avec le mot de passe:
-"Aimez-vous les cigarettes ?"
-"Je préfère les bleues !"
Et ils envahirent la maison. Dénonciation ? Maladresse ?
Claudie Rolfe qui avait émis la nuit précédente, était encore au lit, son
matériel de radio dispersé dans la chambre. Son garde du corps chargé de
la protéger, François Bruneau arrêté avec elle, réussit à s'évader et les
menottes aux mains, parcourt 16 kilomètres pour prévenir Pierre Charié de
l'arrestation de la radio.
Internés à Montargis, Orléans puis Fresnes, les époux Verdier sont séparés
pour être dirigés, lui sur Buchenvald puis Dora, elle sur Ravensbrûck.
Telles sont les étapes de leur supplice.
Envoyé à Elrich, Maurice Verdier est miné moralement et physiquement. De
constitution d'athlète, il est devenu une proie facile pour le mal. Il
décède en décembre 1944 d'une congestion pulmonaire.
Jeanne après un "court" séjour dans les camps de Torgan et de Koenigsberg
est renvoyée à Ravensbrûck dans ce camp de misère et de destruction où la
mort était systématiquement organisée. Là, Claudie Rolfe fut pendue avec
plusieurs Anglaises des réseaux de renseignements.
Jeannette Verdier porte le matricule 57.957. Elle n'est plus qu'un simple
numéro, une esclave. Elle fait preuve d'une énergie indomptable. Avec ses
camarades elle est au courant de l'avance alliée et conserve l'espoir.
Elle veut revoir la France, son fils, son mari, sa famille. Mais sa
volonté ne suffit pas; sa santé subit un rude assaut et ne peut résister à
ces terribles épreuves. Très malade et très affaiblie elle retrouve enfin
le 27 juin 1945 le chemin de la France et de la Liberté. Elle est
hospitalisée à l'hôpital Cochin où elle apprend la mort de Maurice .
Affectée par la tuberculose, pendant près de deux ans elle va lutter
contre la maladie. Malgré tous les soins dont elle était entourée son
organisme trop touché a été vaincu. Elle décède la 18 avril 1947 à
Sainte-Feyre.
Le maire de Gourdon termine son discours ainsi:
"Jeanne Dauliac, enfant de Gourdon,
Tu as apporté et développé avec ton mari dans la petite ville de Nargis,
l'esprit de la Résistance et de la confiance dans notre France. Les jeunes
générations que vous avez élevées ne vous oublieront pas et les éducateurs
de demain, en vous citant en exemple, fixeront à jamais le bilan de cette
période tragique qui aura marqué le niveau le plus bas auquel pouvait
descendre l'humanité.
Dans le malheur qui frappe ta famille, Gourdon qui t'a vu naître pleure
aussi un de ses enfants. Tu n'étais qu'une petite femme mais tu étais une
grande Française. Tu as fait face aux barbares et tu as souffert. Nous
nous inclinons à ta mémoire. Nous saluons une Patriote et une Martyre".
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